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Retrouvez tous les épisodes de la série « L’art en quête de transcendance » ici.
Pirly Zurstrassen se souvient précisément du moment où il s’est assis au piano après s’être formé à la transe en 2021. « J’ai senti une libération incroyable, raconte ce pianiste, accordéoniste et compositeur belge. Comme si la transe m’autorisait à faire ce que j’avais toujours su faire, mais que je gardais caché au fond de moi. » Enthousiaste, ce professeur qui a enseigné pendant trente-trois ans dans la section jazz du Conservatoire royal de Bruxelles a alors proposé un stage de transe à ses étudiants.
Pratique mystérieuse et chargée de fantasmes, la transe est associée à des rituels menés par de nombreux peuples autochtones, parfois sous l’influence de psychotropes. « L’état de transe n’est ni une pathologie ni un don, c’est une modulation du comportement cérébral caractéristique des états non ordinaires de conscience, au même titre que l’hypnose et la méditation », martèle Corine Sombrun. Cette musicienne de formation a vu la transe chambouler sa vie lors d’un reportage en Mongolie en 2001. En entendant le tambour d’une chamane, elle s’est sentie devenir loup, une expérience transformatrice racontée dans plusieurs livres et dans le film Un Monde plus grand, de Fabienne Berthaud (2019).
Rentrée en France après une formation aux pratiques chamaniques en Mongolie, Corine Sombrun n’a eu de cesse de comprendre les processus à l’œuvre dans son cerveau pendant la transe. Convaincue de ses potentialités, elle s’est associée à des chercheurs, créant un institut de recherche spécialisé, TranceScience. Mais elle a aussi mis au point des boucles de son qui permettent d’induire un état de transe chez plus de 90 % des gens. Rebaptisée « transe cognitive auto-induite » ou TCAI, cette transe peut être déclenchée – après un apprentissage – par la simple volonté.
Dès le début, Corine Sombrun a associé des artistes à ses recherches. « Ils ont été les premiers cobayes ! », dit-elle. Entre les artistes et la transe, il existe des affinités naturelles : « Ils connaissent déjà un état de conscience modifié lors du processus créatif, où la partie analytique du cerveau est mise en sourdine, explique-t-elle. Cet état, ils le vivent, mais ne le maîtrisent pas. La transe permet de l’apprivoiser et de le pousser plus loin. » Enseignante à TranceLab, organisme de formation fondé par Corine Sombrun, l’illustratrice Virginie Pfeiffer organise des stages de découverte de la TCAI à destination d’artistes professionnels et des ateliers dans des écoles d’art en France, en Belgique ou en Autriche. Elle insiste sur la place centrale qu’occupe le corps dans le processus. « Les artistes retrouvent le plaisir du jeu, estime-t-elle, se libèrent du regard des autres, des enjeux de carrière, de l’autocensure… Ils ont aussi accès à des informations, à des expériences sensorielles, à des mémoires collectives qui ne leur sont pas offertes dans un état ordinaire, ce qui enrichit leur créativité et leur palette d’expressions. »
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